EXPOSITION ET LIVRE Rubrique

L’Odyssée blanche du photographe Alexis Pazoumian


Il nous avait rapporté un magnifique reportage sur la communauté arménienne de Yakoutie, paru dans le numéro 242 des Nouvelles d’Arménie Magazine. Alexis Pazoumian a rassemblé des photos prises dans cette région reculée du monde pour en proposer une exposition et un livre, les deux intitulés Sacha.

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Témoignant du dérèglement climatique, Alexis Pazoumian nous raconte sur pellicule l’odyssée qui l’a perdu dans la région la plus froide du monde, la Yakoutie (la ville de Yakoutsk vit à -45°, avec à peine 5h de lumière du jour en décembre et janvier). Cœur glacial d’une Russie dont on estime qu’elle se réchauffe trois fois plus rapidement que le reste de la planète.

Ces images et le texte qui l’accompagne sont le résultat d’un projet réalisé entre 2017 et 2018 à l’Est de la Sibérie. " Si cet endroit m’a attiré, c’est sans doute à cause de mon histoire familiale. Mon grand-père, Richard Jeranian, était peintre – l’un des premiers artistes de sa génération à se rendre à Moscou en 1957. Les récits de ses voyages ont bercé mon enfance, faisant mûrir en moi l’envie de découvrir ce territoire », raconte Alexis Pazoumian à nos confrères de Fisheye. En effet, après le terrible tremblement de terre qui a dévasté l’Arménie en 1988, une branche de sa famille a émigré vers la Sibérie pour fuir la misère. C’est à Yakutsk qu’ils ont élu domicile, comme de nombreuses minorités telles que les Kirghizes ou les Ouzbek.

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L’exposition et le livre Sacha qui résultent de ce travail documentaire et personnel sur place retracent le parcours de l’auteur depuis Yakutsk et la tristement célèbre route des goulags, jusqu’à l’homme Sacha ; un éleveur de rennes épris de liberté vivant seul au milieu de la taïga. Sacha est attaché à une façon de vivre primitive et austère, mais avec ses allures de premier homme, comment ne pas le considérer comme l’un des représentants d’un monde en voie de disparition. S’adaptera-t-il encore longtemps aux modifications climatiques ?

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Cette République a connu les goulags des années 1930-1955, puis les Komsomols avec le début de l’industrialisation des années 1960. Son développement s’est accéléré depuis l’éclatement de l’URSS où le secteur privé a pris le relais du secteur public : la mine de Mirnyy, à 1000 km à l’ouest de Yakoutsk, produirait 20% du diamant brut du monde, et la République exploite et exporte par ailleurs or, charbon, étain, gaz et pétrole. Les Yakoutes disent que « lorsque Dieu a survolé la Yakoutie un jour d’hiver, ses mains ont gelé et il a ainsi laissé échapper tous ses trésors  ».

« Mon travail est centré sur l’humain. Je documente les minorités qui, mises à l’écart de la société, souffrent de leur image. En m’intéressant à leur quotidien, à leurs traditions, j’essaye de les représenter avec sincérité », explique Alexis Pazoumian. C’est dans les favelas du Brésil que le photographe a commencé à réaliser ses séries humanistes. Grand voyageur, il a, depuis, visité, entre autres, la Nouvelle-Orléans et l’Arménie. Appareil photo en main, il documente la vie sur place avec douleur et réalisme. Dans cette odyssée blanche du Grand Nord, il cherche à savoir qui il est vraiment.

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Sacha, d’Alexis Pazoumian
Exposition jusqu’au 21 mars, à la Galerie Just Jaeckin - 19 rue Guénégaud, 75006 Paris
Le livre est paru aux (éditions André Frères) (37 euros, 60 p.)

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par Claire le mardi 3 mars 2020
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