Création de la première base de sondage numérique pré-recensement d’Arménie

par

©armenews.com

L’Arménie, en collaboration avec la Banque mondiale et WorldPop, a développé sa première base de sondage numérique pré-recensement en utilisant la technologie géospatiale pour remédier aux méthodes d’enquête obsolètes et aux changements démographiques. Cette approche innovante garantit une collecte de données précise et rentable et constitue une référence mondiale pour les méthodologies d’enquête modernes.

L’Arménie a relevé l’un de ses défis statistiques les plus pressants dans le cadre d’une collaboration novatrice entre le département mondial de la Banque mondiale chargé de la pauvreté et de l’équité, WorldPop de l’université de Southampton et d’autres instituts de recherche internationaux. Le pays manque depuis longtemps d’un cadre d’échantillonnage national fiable pour mener des enquêtes représentatives auprès des ménages, un outil essentiel pour l’élaboration des politiques et les réformes socio-économiques. La nécessité pour l’Arménie de disposer de méthodes de collecte de données actualisées a été exacerbée par les déplacements internes de populations provoqués par le conflit du Nagorno-Karabakh, qui a considérablement modifié les répartitions démographiques. Cette toute première base de sondage numérique pré-recensement offre une solution innovante et accessible à ces défis, en s’appuyant sur les technologies géospatiales pour produire des unités d’échantillonnage compactes et précises.

Au cœur de cette transformation se trouve le concept de « zones de pré-recensement » (ZPR), conçues à l’aide d’un processus semi-automatisé qui combine des outils géospatiaux avancés et des ensembles de données accessibles au public. Les zones de pré-dénombrement ont été construites à l’aide des données démographiques quadrillées de WorldPop, des détails d’infrastructure d’OpenStreetMap et de la couche mondiale des établissements humains. Ces unités d’échantillonnage, dont la population varie de 100 à 1 000 personnes, sont délimitées par des frontières naturelles et administratives, offrant ainsi un cadre gérable et cohérent aux enquêteurs. Cette approche innovante contraste fortement avec les méthodologies existantes en Arménie, qui s’appuient sur des zones de recensement ou des circonscriptions électorales obsolètes. Les limites de ces anciens systèmes, telles que les grandes unités géographiques, les données incomplètes sur les frontières et les estimations démographiques dépassées, les ont rendus inefficaces et coûteux pour les enquêtes auprès des ménages.

L’efficacité du nouveau cadre d’échantillonnage a été testée dans le cadre de l’enquête « À l’écoute de l’Arménie » de la Banque mondiale, qui visait à comprendre le sentiment du public à l’égard des réformes sociales et économiques. L’enquête a utilisé une méthode d’échantillonnage en grappe stratifiée à deux degrés, les pré-EA servant d’unités primaires d’échantillonnage. Au total, 400 unités primaires ont été réparties proportionnellement entre les régions urbaines et rurales de l’Arménie, assurant ainsi une représentation équilibrée de sa population. Dans un premier temps, les pré-EA ont été sélectionnées en fonction de la taille de la population, tandis que dans un second temps, les ménages ont été choisis au hasard au sein de ces unités. Cette méthode a permis non seulement d’assurer une représentation équitable, mais aussi d’optimiser l’allocation des ressources et la logistique de l’enquête. La mise en œuvre réussie de cette enquête a démontré la praticité et la précision du cadre des pré-EA, prouvant son potentiel de reproduction dans des contextes similaires à ressources limitées.

Relever les défis grâce à la précision géospatiale

Si le cadre pré-EA s’est révélé extrêmement prometteur, il n’est pas sans poser de problèmes. Le fait de s’appuyer sur des données démographiques maillées introduit des biais potentiels, car ces estimations ne reflètent pas toujours les changements démographiques en temps réel. Par exemple, les données utilisées pour le projet ont été tirées de l’ensemble de données démographiques quadrillées 2020 de WorldPop, qui peuvent ne pas refléter pleinement les changements récents dans la distribution de la population. De même, des frontières numériques incomplètes ou de mauvaise qualité ont parfois donné lieu à des unités d’échantillonnage surdimensionnées ou irrégulières, ce qui a nécessité des ajustements manuels pour affiner les résultats. Malgré ces limites, l’approche pré-EA représente une amélioration significative par rapport aux méthodes traditionnelles, qui nécessitent souvent des années de numérisation manuelle et des ressources financières considérables. Dans le cas de l’Arménie, le processus automatisé, complété par des corrections manuelles mineures, a été réalisé en seulement deux mois par un seul spécialiste.

Un modèle pour une application mondiale

La réussite de ce projet a des implications d’une portée considérable au-delà de l’Arménie. L’évolutivité et l’efficacité de la méthodologie la rendent particulièrement pertinente pour d’autres pays en développement, notamment ceux qui sont confrontés à des conflits, des déplacements de population ou des systèmes de recensement obsolètes. Dans de nombreux pays, les bureaux nationaux de statistiques sont réticents à partager les données de recensement avec les organisations internationales, ce qui complique encore les efforts d’enquête. Même lorsque les données de recensement sont accessibles, les zones de dénombrement couvrent souvent de vastes populations, ce qui augmente le coût et la complexité de la mise en œuvre de l’enquête. Le cadre pré-EA offre une alternative transformatrice, permettant aux chercheurs de construire des unités d’échantillonnage précises, rentables et conformes aux normes internationales. Son utilité s’étend aux régions développées et en développement, fournissant un modèle reproductible pour la conception d’enquêtes modernes.

Le saut dans le futur de l’Arménie

L’adoption par l’Arménie de la méthodologie pré-EA marque un tournant dans son approche de la conception des enquêtes, en offrant un cadre reproductible et évolutif qui répond aux défis de longue date en matière de collecte de données. En intégrant des outils géospatiaux avancés à des techniques économes en ressources, le projet ne se contente pas de moderniser l’infrastructure d’enquête de l’Arménie, il établit également une référence pour d’autres pays. Le cadre pré-EA garantit un niveau de précision et de rentabilité jusqu’alors inaccessible, ce qui permet aux décideurs politiques de prendre des décisions éclairées sur la base de données précises et représentatives. Alors que les chercheurs continuent d’affiner la méthodologie et d’explorer ses applications au niveau mondial, l’initiative de l’Arménie constitue un modèle d’innovation en matière de collecte de données publiques. Cet effort novateur laisse présager un avenir meilleur pour les méthodes d’enquête, en particulier dans les régions où des données fiables sont essentielles pour une gouvernance équitable et efficace.


Nos lecteurs ont lus aussi